
"Je ne me verrais pas faire autre chose" - COMM'une info n° 87
Il suffit de franchir la porte du chalet du Gros Caudon, à 1’450 mètres d’altitude au-dessus de Blonay, pour avoir envie de déguster un morceau de fromage d’alpage. La bonne odeur du lait qui cuit au feu de bois dans l’immense chaudron en cuivre fait directement appel à nos sens. Dans la pièce, on retrouve Patrick Mauron et sa maman, Yvonne, qui s’affairent autour du chaudron. Il va en effet bientôt falloir en extraire le caillé pour le mettre dans les moules.
Une histoire familiale
Domicilié le reste de l’année à Avry-sur-Matran (FR), l’agriculteur est arrivé à l’alpage des Guedères en 2003. Avant cela, il avait déjà eu l’occasion d’exercer son savoir-faire en Valais, du côté de la Grande Dixence et de Taney, puis au Col de Chaude, sur la Commune de Villeneuve, où il a passé près de 23 ans. La production de fromage d’alpage, une histoire familiale puisque Patrick a appris le métier avec son papa Michel, maître-fromager, aujourd’hui affaibli dans sa santé mais qui l’a accompagné dans ses débuts aux Guedères. « On a toujours vécu dans les montagnes», précise-t-il sous l’oeil d'Yvonne, 73 ans, qui l’assiste encore aujourd’hui dans son travail. « J’adore la montagne. Et puis, travailler avec mon fils est quelque chose d’extraordinaire, même s’il faut quand même que je le gronde de temps en temps », nous confie-t-elle avec le sourire.
10 tonnes par an
Chaque saison, ce ne sont pas moins de 10 tonnes de Gruyère d’alpage AOP qui sont produites de juin à septembre dans le chalet du Gros Caudon et dans celui des Guedères, situé deux kilomètres plus bas. « Rendez-vous compte, les premières archives qui mentionnent le Gros Caudon datent de 1414. Cela fait plus de 600 ans que l’on fabrique du fromage ici. C’est juste incroyable », nous raconte Patrick non sans une certaine fierté. Le Gros Caudon ne disposant pas de cave, c’est dans le chalet des Guedères que les meules sont affinées trois à quatre semaines, avant de partir du côté de Bulle, chez Fromage Gruyère SA, où elles y resteront au minimum cinq mois avant de pouvoir être dégustées.
« Ma télé ? La nature autour de moi »
Tant Patrick que sa maman Yvonne en conviennent : vivre à l’alpage n’est pas chose facile, entre l’entretien des plus de 120 hectares de surface, le soin aux quelque 130 têtes de bétail en estivage, la production de fromage, le fauchage, la pose de clôtures pour ne citer que ces tâches. « Si on n’est pas passionné, on ne peut pas faire ça. C’est d’autant plus vrai qu’on est complètement déconnecté ici. Moi, ma télévision, c’est de me mettre tous les soirs devant la fenêtre et de regarder ce qui se passe dehors. C’est toujours le même programme, mais c’est tellement beau. Encore ce matin, j’ai aperçu un couple de lièvres. L’autre jour, c’était des bouquetins et des sangliers. »
Une ténacité qui paie
Tous les cinq ans, l’Interprofession du Gruyère récompense les meilleurs producteurs du fromage du même nom. Deux fois par année, elle effectue des sondages auprès des alpagistes concernés. Les critères évalués sont l’aspect extérieur, le goût, la pâte et l’ouverture. C’est la moyenne de ces échantillons sur les cinq ans qui détermine les résultats. Or, depuis qu’il a repris l’alpage des Guedères il y a près de 20 ans, Patrick Mauron a été distingué trois fois. « J’ai obtenu une médaille d’argent en 2009, une distinction en 2018 et une médaille de bronze en 2024. C’est sûr que c’est une belle reconnaissance par rapport au labeur qu’on effectue tous les jours mon équipe et moi. » Comment explique-t-il ces bons résultats ? « Il y a beaucoup de facteurs mais je dirais la persévérance. C’est un travail de tous les jours. Il faut constamment être à son affaire, tenir sur la régularité. De manière générale, j’aime aller chercher le petit plus, ne pas me contenter de ce que j’ai. »
Vente libre
Pour celles et ceux qui souhaitent déguster le Gruyère AOP 100% blonaysan, il suffit de se rendre au chalet des Guedères, accessible en voiture, les après-midis jusqu’à fin septembre, week-ends compris. L’occasion de compléter son panier avec d’autres produits maison en vente : fromage des Guedères, tommes et sérac notamment. À noter que l’agriculteur organise aussi des démonstrations de fabrication de fromage d’alpage sur demande.
Alpage des Guedères, contacts :
Patrick Mauron, 079 310 69 05, Yvonne Mauron 079 738 86 39.
Les Montagnes de Caudon, 600 ans d’histoire Désireux d’en savoir plus sur l’histoire du chalet de Caudon ? L’ouvrage « Les Montagnes de Caudon » de Madeleine Hirtzel (2014) retrace ses 600 ans d’existence. Un livre qu’il est possible de commander à l’adresse suivante : drevetcaroline@gmail.com, au prix de 35 francs |
Ne manquez pas la traditionnelle Désalpe ! Celle-ci aura lieu le samedi 27 septembre prochain de 10h à 18h au Grand-Pré à Blonay. En tout, plus d’une centaine de vaches, en provenance des alpages des Guedères, de La Neuve et des Pontets, prendront part à la manifestation, revêtues de leurs plus beaux atours et accompagnées des armaillis. S’il est possible de les suivre tout au long de leur parcours, le public a rendez-vous au terrain où l’attendront petite restauration et diverses animations musicales (cor des alpes, sonneurs de cloches…). De 18h à 2h du matin, après le son des cloches, place aux platines. La Jeunesse de Blonay – St-Légier vous accueillera pour une soirée musicale all styles. Pour tous renseignements : |
COMM'une info n° 87 - septembre 2025
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