" Se souvenir du temps qui passe... " - COMM'une info n° 80
L’émotion est palpable au moment d’évoquer la cessation d’activité de l’entreprise qu’il a créée il y a plus de 40 ans. D’abord installé à la route du Village 36 puis, depuis 2010, au numéro 7, Denis Gigandet a restauré nombre de pendules et de montres avec passion et curiosité. Une aventure qu’il débute au milieu des années 80 en reprenant le carnet d’adresses qu’il avait préalablement développé dans le secteur du lavage chimique. « Je faisais du porte-à-porte pour ramasser des tapis, des rideaux et divers textiles à nettoyer. Lorsque l’entreprise pour laquelle je travaillais a fait faillite, une petite voix intérieure m’a dit : reprends ce carnet d’adresses pour développer ton affaire dans l’horlogerie », nous explique-t-il, en précisant qu’il prend toujours soin d’écouter son intuition.
Des horloges sur tous les murs
L’entrain de l’horloger et son savoir-faire font mouche et la clientèle le suit. Au milieu des années 80, la place commence à faire défaut dans le domicile familial. « Je repartais avec les pendules de mes clients à la maison. Je les rénovais, puis en attendant le retour de leurs propriétaires, je les accrochais contre les murs de la maison : au salon, à la cuisine, dans les chambres… Ma femme a fini par en avoir marre des tic-tac et des sonneries », rigole-t-il. Denis Gigandet reprend alors son bâton de pèlerin et s’en retourne frapper aux portes, à la recherche d’un local où installer son atelier. Après un premier refus, il parvient à convaincre un propriétaire de lui mettre à disposition un local à la route du Village 36 à Blonay. « Mon établi était positionné face à l’entrée. La clientèle me voyait travailler depuis l’extérieur. Cela a tout de suite décollé », se souvient-il.
Des changements d’habitude
2010 marque un nouveau tournant. Après avoir mis entre parenthèses son affaire et exercer pendant deux années en tant que responsable d’atelier au sein d’une fabrique horlogère bulloise, le rhabilleur de pendules cherche un nouveau point de chute. Un local à la route du Village numéro 7 est justement sur le point de se libérer. Il reprend le bail. Les affaires reprennent. En 2018, Denis Gigandet est rejoint par sa fille Nathalie, laquelle fait souffler un vent de fraîcheur sur l’entreprise. Ses formations dans les domaines du commerce et du design lui offrent un large panel de compétences. Elle profite de l’expertise de son papa pour se familiariser au monde de l’horlogerie. « J’ai beaucoup appris à ses côtés, nous glisse la trentenaire. Durant 6 ans, j’ai pu bénéficier de l’expérience d’un maître horloger. » La jeune femme va dynamiser l’image de la société et fonctionner quelques années avec un horloger en atelier afin de soulager son paternel. Le Covid-19 et un désintérêt progressif de la clientèle pour les pendules vont toutefois avoir raison de l’enthousiasme du binôme, rendant la fermeture inévitable.
Finir en douceur
Si Nathalie a quitté l’entreprise à la fin du mois de juin, son père compte terminer son activité à la fin décembre. Piano et voyages figurent au programme de Denis Gigandet, même s’il ne compte pas complètement tourner le dos à l’horlogerie. « Je vais ouvrir un atelier à mon domicile à Remaufens (FR). Je continuerai à proposer de la restauration. » Nathalie compte profiter de cette cessation d’activité pour réorienter sa carrière dans le domaine de la nutrition. « Un secteur d’avenir », juge-t-elle. Le tandem s’apprête donc à tourner définitivement la page de cette aventure familiale en partageant toutefois le secret espoir qu’un passionné franchisse le seuil de leur boutique en leur proposant une reprise.
COMM'une info n° 80 - septembre 2024